A Sainte Lucie, les rastas des pitons

Le Marin, comme Hyeres ou La Trinité, a tout du refuge XXL pour voileux. Si la peau noire y est rare, excepté celle des lingères pour charters, on y croise des petits-enfants de Moitessier, des grands dégingandés à l’allure souple, propre aux marins qui manœuvrent sur des ponts en mouvement, au corps noueux à force de d’étarquer drisses, bouts, bosses, écoutes, aussières, au regard bleu délavé et réservé de ceux qui connaissent le vrai mauvais temps.

Bonjour Yamina, bonjour Christophe, ces deux-là doivent nous confier les clés du bateau, et, en principe, nous en faire la présentation … en l’absence du propriétaire, qui vit à Saint-Pierre-et-Miquelon, non loin de Terre-Neuve, à quelques encablures dans le nord. Présentations. Yamina est aussi de Saint-Pierre, Christophe est de Raiatea, archipel de La Société, cela tombe bien car nous aussi arrivons d’une ile exotique, l’Ile-de-France, précisément banlieue ouest, son plus beau rivage. La France décidément couvre toutes les mers du globe.

Maintenant the bateau, et, surprise pour nous qui avons l’habitude de louer ces roulottes flottantes produites en Vendée, sauf qu’à la fin on enlève les roues, jamais plus séduisantes que sur les flots immobiles du salon nautique. Non, ici, c’est un autre concept. Plutôt une Ford Mustang qu’un break diesel, architecte Bruce Farr, américain distingué, genre qui aurait pu dessiner Endeavour ou Shamrock, mat carbone, gréement rod, barre à roue d’un mètre quarante, coque sandwich habillée d’une robe bleue, grand-voile marquée, volume intérieur totalement ouvert. Cette fois on pourrait tous les laisser dans notre tableau arrière!

Météo pas vraiment engageante sur le secteur, pluie, vent pour commencer, et ensuite, vent, pluie, quand on n’aime pas, on ne compte pas non plus! On prend 40 noeuds sous les grains en quittant la Martinique, et rebelotte en arrivant sur Sainte-Lucie. Pas de photos, la mer n’est pas belle à voir, ça ferait trop peur. Nous avons été avisés de garder deux ris depuis le départ… pluie torrentielle à Rodney Bay pour aller faire notre clearance. Avec le soleil revenu, oublions!

Nous voici maintenant au mouillage à La Soufriere, au sud de Sainte Lucie. Toponymie francaise pour cette ile qui a changé quatorze fois de main entre francais et anglais, pour devenir définitivement anglaise en 1814 (merci Napoléon!) et cela jusqu’à son indépendance totale en 1979.

Etonnante La Soufriere! Deux pitons volcaniques l’encadrent, un paysage qui rappelle ceux de Tahiti Nui ou de Moorea, partout des effluves d’hydrogène sulfuré. Une nature luxuriante, des sources chaudes et soufrées, nous ne regrettons pas de lâcher une liasse de dollars caribéens pour le circuit touristique avec bains de boue soufrée, puis bains aux sources chaudes, puis bain de mer et bière locale « Piton » pour se rincer extérieur et intérieur.

Mais le clou revient au village et à ses habitants. Les maisons de bois sont hyper attachantes de couleurs et de rusticité, forment un décor de poupée, hors du temps.

Quant aux habitants, on y croise d’extraordinaires rastas, échappés d’un bal costumé, avec tous les accessoires du genre, barbe longue tressée, pin’s de Hailé Sélassié en costume impérial, improbable bonnet aux couleurs éthiopiennes, pantalon bouffant beaucoup, ça change du bureau à Courbevoie.

Autre étonnement avec beaucoup qui parlent un francais cassé, autrement dit créole, bien résistant après 200 ans de domination anglaise. « Comé poi son? » demande une habitante au marché, qui s’étonne que nous comprenions sa question. Et, en prime, des gens hyper-gentils! Cela nous fait tout drôle, en plus du soleil, on a trop perdu l’habitude.

S’abonner
Notifier de
guest

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

4 Commentaires
le plus récent
le plus ancien le plus populaire
Inline Feedbacks
Voir tous les commentaires
Marie Pierre

Super mes amis, aujourd’hui grisaille et fraîcheur ici…merci pour ces beaux rayons de soleil! J’en veux encore ? Je vous embrasse ???

Bernard

On eut pu supposer que le bain de boue soufrée vous ait fait une jolie tunique jaune (de saison ) ….

Jean

Faudra quand même que vous nous envoyiez une photo du bateau ! (j’ai failli pas reconnaitre Philippe avec sa robe verte et son bonnet Rasta)

robert LUCIANO

Vous nous étonnerez toujours, nous, nous allons nous limiter à Minorque. Nous vous souhaitons bon vent avec une mer plus clémente. robert.

4
0
Qu'en pensez-vous? Merci de vos commentaires!x