Popayan, Cali, Medellin, Carthagène des Indes, Santa Marta
Le voyageur détecte ce que l’habitant ne voit plus, trop près de son objet. A ce jeu nous constatons d’énormes différences entre des villes qui, parties du même point de l’histoire, leur fondation au XVIeme siècle par un conquistador espagnol, au nom devenu légendaire, ont, par la suite, connu des fortunes très diverses.
Si Popayan possède une belle architecture coloniale en son centre, celle-ci est dénaturée par un usage trivial de la ville, où, comme à Bogota la circulation sature toutes les voies et rend l’air irrespirable. Quant à sa banlieue, c’est-à-dire tout ce qui se situe à plus de 500 mètres du centre, elle n’est qu’un bidonville hétéroclite, où dominent casses et ateliers bordéliques, abominablement sale, un coupe-gorge, une horreur.
A Cali le centre historique est très limité, à peine une petite église ancienne, un cloître, deux ou trois plaques commémoratives, pas de quoi traverser l’Atlantique. Toutefois le barrio San Antonio, où se regroupent les petits hôtels pour touristes et qui fait figure de lieu de sortie, est agréable et branché. Dans un bar très chic nous y dégustons deux cocteles en ce 7 février anniversaire de Catherine, sur fond de chanson française. Le centre moderne avec une étonnante place plantée de hauts palmiers maigrichons, entourée de bâtiments assez raides, surprend. Le rio Cali est bordé d’une belle promenade. La visite du jardin zoologique se révèle une excellente surprise, c’est très bien fait, et les animaux y paraissent bien traités. L’ours des Andes, une grosse peluche au museau noir et blanc. La reconstitution de demeures indiennes est aussi bien léchée, un plaisir. Il passe pour le plus beau jardin zoologique d’Amérique du Sud.
Nous loupons la fameuse soirée salsa dans sa ville capitale car les établissements n’ouvrent qu’en fin de semaine… que pena!
Attention cependant, un couple de jeunes français rencontrés un peu plus tard, débarqués à Cali directement depuis Paris, s’est fait agresser en allant visiter le mirador qui domine la ville. Le large couteau qu’on leur a présenté les a convaincus de laisser appareil photo et smartphone, quelques billets, seuls biens qu’ils avaient sur eux, puis de faire 20 heures de bus pour oublier. Je lisais dans le quotidien de Cali une chronique déplorant ces milliers de meurtres à l’année pour rien, les cadavres de femmes qu’on retrouve dans les décharges, ou découpés ici et là, l’ordinaire.
Medellin nous paraît un autre monde, la Colombie du futur? Un réseau de transports en commun avec des lignes de RER, des tramways. Aussi beaucoup moins de ces collectivos bruyants et fumant qui encombrent les rues des autres villes. Autre exception étonnante, tout paraît propre, pas la Suisse, non, mais pas d’ordures qui s’amoncellent, ni de sacs plastiques et d’emballages qui jonchent les rues, jusqu’à la nausée, comme on le voit si souvent en Colombie.
Un quartier central très piétonnisé, des musées, une phénoménale place des esculturas de Botero, la maison musée de Pedro Nel Gomez, de style art déco et vibrante de sa peinture, tableaux ou fresques très puissantes.
Enfin, lorsque nous sortons de Medellin à 5h du matin, belle surprise de voir autant de cyclistes sportifs qui se cognent la cote vers Rio del Negro, pas moins de 1000 mètres de dénivelée, pour redescendre avant 7 ou 8h, à l’heure de rejoindre leur bureau. Une modernité indéniable. C’est la ville de Nairo Quintana, le héros colombien du tour de France.
Le temps du cartel de Medellin paraît conjuré, depuis que son chef ignoble, Pablo Escobar, en fuite après avoir corrompu les gardiens de sa prison, fut abattu par la police sur un toit de la ville. Un sale type vraiment, « el patron del mal« , dont la promesse se réduisait à « plata o plomo« .
Carthagène des Indes, c’est la ville musée. Détentrice d’une histoire mouvementée et d’une architecture coloniale bien conservée à l’intérieur de ses remparts, elle est incontournable. Un Saint-Malo tropical (petit effort d’imagination!), ou un Lucques à la colombienne, … Pour les espagnols de la conquête, Cartagène des Indes, située au fond de la mer Caraïbe, fut la principale porte d’entrée et de sortie en Amérique du Sud, pour pénétrer vers le Pérou, le Chili et même l’Argentine. Un énorme trafic d’or et d’argent pendant trois siècles. Ici il n’est question que des sacs perpétrés par les pirates, ou corsaires lorsque commandités par les rois, dont Francis Drake l’anglais, … Amusant de penser que les conquistadors espagnols pillaient les indiens, puis se faisaient piller par les pirates de tous bords, le vol n’est pas une industrie récente.
La vieille ville de Cartagène constitue aujourd’hui une grosse attraction touristique. Il n’y a pas grand chose à faire sinon déambuler dans les rues et lever le nez, en se rangeant du soleil. Les musées officiels sont un peu décevants, en-deçà du mythe, dommage. Le vrai musée est en réalité dans la rue, une myriade d’hôtels de charme, de restaurants, de placettes animées, de très nombreuses œuvres d’art dispersées dans la ville, des portes splendides, des patios très soignés, amigo, amigo, donde viene? On se laisse aller de terrasse en terrasse. A quelques encablures de la vieille ville a poussé un Manhattan colombien, bâti sur une étroite langue de terre entre mer et lagune. Un rapide tour en vélo dans la zone nous interpelle une fois de plus sur la nature humaine et ses desseins, pourquoi tant d’horreur?
Santa Marta fut le premier établissement des colons espagnols en Amérique du Sud. La ville est aujourd’hui très active avec son port de commerce, mais aussi avec le tourisme, y-compris des colombiens. Le centre et le front de mer y sont très animés, très festifs, il vaut mieux prendre un peu de distance pour la nuit. C’est un point de passage obligé pour des randonnées ou encore des programmes plage dans la région. A deux pas, le village de Taganga est un grand spot de plongée, dommage que notre appareil photos ne soit pas sous-marin!
… déjà la fin du voyage? Que pena!
Allez, encore quelques photos pour les courageux,
Philippe & Catherine,
Hasta Luego